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Lire, quel plaisir?

« A ceux qui ne lisent jamais autre chose que leurs cours ou que la page des sports du journal ».

 

Les livres dont il sera question ici, ce ne sont pas ceux de statistiques ou d’économétrie, ni ceux de droit public ou de démographie... ce qui ne retire rien à leur utilité et à leur intérêt pour découvrir le monde et acquérir une formation.

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      Non, il sera ici question des livres de littérature, des romans de toutes sortes. Parmi ces livres là, encore faut-il distinguer :

      « Il y a de bons livres, des livres quelconques et de mauvais livres. Parmi les bons, il en a d’honnêtes, d’inspirants, d’émouvants, de prophétiques, d’édifiants. Mais dans mon langage, il y en a d’une autre catégorie, celle des livres-ha !

      Les livres-ha ! sont ceux qui déterminent dans la conscience du lecteur un changement profond. Ils dilatent sa sensibilité d’une manière telle qu’il se met à regarder les objets les plus familiers comme s’il les observait pour la première fois.

      Les livres-ha ! galvanisent. Ils atteignent le centre nerveux de l’être, et le lecteur en reçoit un choc presque physique. Un frisson d’excitation le parcourt de la tête aux pieds » écrit fort justement Vernon Proxton dans son livre Anna et Mister

 

 La lecture de ces livres-là ne me laisse pas indifférent ; ils me donnent envie d’en parler, d’en faire partager la découverte à mes meilleurs amis, un peu comme on partage une bonne recette, ou un petit trésor. Ces livres deviennent pour moi sources de réflexion, d’enrichissement, voire même de libération ou de guérison intérieures. Pourquoi cela ?

 

Homme, je suis toujours en recherche de sens, continuellement en train d’interpréter le monde, les événements, les autres, moi-même. Et la lecture est justement un des lieux les plus intenses d’interprétation, de compréhension. Alors, oui, ce livre me permet de grandir dans mon humanité ; il me guérit. Un peu, mais pas tout à fait comme pourrait le faire la conversation avec un véritable ami :

 

« La lecture ne saurait être assimilée à une conversation, fût-ce avec les plus sages des hommes. Ce qui diffère essentiellement entre le livre et un ami, ce n’est pas leur plus ou moins grande sagesse, mais bien la manière dont on communique avec eux, la lecture, au contraire de la conversation, consistant pour chacun de nous à recevoir communication d’une autre pensée, mais tout en restant seul, c’est à dire continuant à jouir de la puissance intellectuelle qu’on a dans la solitude et que la conversation dissipe immédiatement, en continuant à pouvoir être inspiré, à rester en plein travail fécond de l’esprit sur lui-même » faisait remarquer Marcel Proust.

 

Pour cela, il ne faut surtout pas que le livre ne fasse que répéter ce que je suis, ce que je pense, ma façon de voir le monde...bref, qu’il soit en face de moi comme un simple miroir.

Il faut au contraire qu’il se présente à moi comme différent, comme « autre ». A ce moment là, il peut me transformer, me faire réfléchir...Mais il est nécessaire que je trouve une certaine distance par rapport au texte que je lis ; je ne dois ni me confondre totalement avec l’auteur, ni être trop opposé à lui, trop loin de lui. Alors le livre va me donner accès à moi-même. Car nul ne se connaît vraiment soi-même tout seul. Pour se connaître, chacun de nous a besoin de faire un détour par l’autre, qui peut être un ami, un proche, un confident ; qui peut aussi être le livre.

 

Que se passe-t-il quand un livre a rendez-vous avec son lecteur ?

 

C’est sans doute le début d’une belle histoire d’amour. Chacun va offrir à l’autre ce qu’il a de plus profond, de plus précieux. Chacun va recevoir de l’autre un merveilleux cadeau : la vie. Sans lecteur, le livre est comme mort. Mais le lecteur lui aussi va découvrir que le livre le fait vivre, lui ajoute de la vie.

Que connaîtrions-nous de l’amour et de la haine, des sentiments moraux, des conflits entre les personnes, de tout ce qui constitue le plus profond de la personne humaine, de ma personne, si tout cela n’avait été exprimé de mille manières, différentes et complémentaires dans la littérature ?

 

Le texte écrit, le roman avec ses personnages, me livre une certaine vision du monde, un certain regard sur les autres, une certaine psychologie, une certaine philosophie de la vie... et tout cela me fait réfléchir, me fait faire un travail à l’intérieur de moi-même : j’apprends à me connaître en face de ses personnages vivant dans les romans que je lis. Soit que je me reconnais dans leurs réactions, leurs comportements, soit au contraire que je les rejette.

 

Mais, et cela est capital, en face de ce livre, je reste libre ; je garde toute ma liberté d’imaginer, de contredire. Liberté d’imaginer pour imaginer la liberté, celle que j’ai sans cesse à inventer dans ma propre vie pour me renouveler, pour casser en moi les idées toute faites, les idéologies trompeuses, les préjugés dangereux.

 

Et se découvrir mieux soi-même, comprendre mieux le monde dans lequel on vit, tout cela est source de plaisir, de joie. La lecture, par les découvertes qu’elle permet, procure de la joie. Les livres deviennent des compagnons qui invitent à poursuivre l’aventure de la vie.

 

Par Bernard JANICOT

Directeur du Centre de Documentation

Economique et Sociale

 

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02/05/2015
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